Les initiatives Fairtrade de l’Université Concordia
Campus équitable depuis 2016, Concordia est un bel exemple des affinités entre pratiques durables et monde universitaire – un contexte propice à la transmission de valeurs essentielles aux jeunes générations. Nous avons rencontré Oliver De Volpi, directeur des services alimentaires d’Hospitalité Concordia, pour parler des réussites et des défis en matière de commerce équitable, ainsi que des initiatives efficaces qui font de cette université montréalaise une championne de la durabilité au Canada.
Merci d’être avec nous aujourd’hui, Oliver! Pour commencer, pouvez-vous nous parler de votre poste à Concordia?
Mon rôle de directeur des services alimentaires d’Hospitality Concordia est assez vaste ; je m’occupe autant de la salle à manger que des ventes au détail et des machines distributrices, en plus des 22 traiteurs qui travaillent sur le campus. Le programme de cafétéria des résidences représente aussi une grande partie de mon travail – pas moins de 1 000 personnes étudiantes vivent ici et mangent trois repas par jour, sept jours par semaine, durant l’année scolaire.
Est-ce qu’il est difficile de mobiliser la communauté, étant donné le renouvellement constant de la population étudiante?
C’est définitivement un défi. Chaque année, le quart de la population universitaire se renouvelle, et on part toujours de zéro avec les personnes qui viennent habiter dans les résidences. Mais la jeune génération est heureuse d’en savoir plus sur les causes qu’elle soutient et sur la signification de Fairtrade. Personne ne se plaint de la petite différence de prix pour le café, le thé, le chocolat ou tout autre produit qui porte le label Fairtrade. En fait, l’entreprise qui s’occupe des machines distributrices m’a même dit que la barre de chocolat équitable arrive au troisième rang des produits les plus vendus, même si elle coûte plus cher que d’autres options proposées!
Nous collaborons aussi avec Camino et achetons de la poudre de cacao, du sucre et du chocolat Fairtrade pour faire des brownies et des biscuits équitables. La clientèle étudiante adore ces pâtisseries – on peut en vendre quelques centaines en l’espace d’une heure environ. C’est sûr qu’elles sont délicieuses, mais je pense aussi que tout le monde aime l’idée d’opter pour un dessert équitable.
De plus en plus, j’ai l’impression que la population étudiante connaît déjà le label Fairtrade et le principe du commerce équitable avant de mettre les pieds ici, et je crois que ce principe, une fois adopté, reste ancré dans les valeurs des gens pour de bon.
Pouvez-vous nous en dire plus sur l’initiative Stingers Roast?
Nous avons créé le café Stingers Roast, nommé d’après nos équipes sportives, pour communiquer les valeurs de Fairtrade à la population étudiante. Pour la production, nous avons approché Brûleries Faro et Cafe Imports et leur avons expliqué que nous cherchions des grains de café biologiques certifiés Fairtrade et que nous voulions nous associer avec une coopérative de production détenue par des femmes – ces dernières sont souvent celles qui cultivent le café, mais elles n’en retirent pas les profits puisqu’une grande proportion des exploitations sont détenues par des hommes. Les grains sont ensuite torréfiés pour nous par Brûleries Faro. Les cafés Stingers Roast de torréfaction légère et moyenne sont offerts dans nos résidences et dans bon nombre de nos points de vente, en plus d’être servis dans plusieurs bureaux de l’université au quotidien.
Comment parlez-vous de Fairtrade à la communauté très hétérogène de Concordia?
Avec 50 000 personnes aux études et près de 7 000 membres du personnel, nous sommes un peu comme un village au cœur de Montréal. Nous avons beaucoup d’affiches qui parlent de Fairtrade, mais arrive un moment où les gens ne les remarquent plus. C’est pourquoi nous tenons deux événements annuels. Le premier est la journée Stingers Roast, où nous servons de l’espresso, du café et des cappuccinos dans le hall d’un de nos plus grands atriums. Les gens passent prendre un café, et nous leur expliquons le concept de Fairtrade. Il y a même des jeux et des prix à gagner! Cet événement amène probablement plus de 1 000 personnes à interagir avec nous et à se renseigner.
Notre deuxième événement a pour thématique la banane et se déroule dans le hall d’un autre atrium quelques semaines plus tard. Nous distribuons des bananes équitables certifiées Fairtrade et partageons un gâteau aux bananes pesant 200 livres préparé dans nos cuisines, une curiosité qui attire les gens et donne l’occasion d’entamer la conversation.
Aramark, notre partenaire, nous assiste aussi dans ces initiatives. L’entreprise s’occupe entre autres des « mardis équitables » : elle propose un produit équitable dans tous nos cafés, et les personnes qui l’achètent obtiennent un café certifié Fairtrade gratuit en prime.
Quels défis se posent à l’interne quand on devient un campus équitable?
Il y a une légère différence de prix. Depuis à peu près six ans, Concordia propose exclusivement des bananes équitables, qui coûtent environ deux fois le prix des bananes non équitables. Payer le double pour un produit peu dispendieux en partant, ça ne pose pas vraiment de problème sur le plan financier. Quand on vend une banane certifiée Fairtrade, on s’assure de payer nous-mêmes la différence. Autrement dit, si une banane se vendait auparavant pour 1 $, la banane équitable se vend elle aussi pour 1 $. Par contre, on n’a pas trouvé de façon de couvrir nous-mêmes le coût supérieur pour d’autres collations, par exemple les mangues séchées.
Les autres difficultés concernent le mûrissement des bananes ou les occasionnelles difficultés d’approvisionnement de nos fournisseurs en produits certifiés Fairtrade dont nous avons besoin. Il faut bien planifier et trouver quelques autres fournisseurs qui sont capables de nous offrir des produits comparables au besoin, car le commerce équitable fait explicitement partie de tous nos contrats de services alimentaires.
Concordia a un grand campus où cohabitent beaucoup de locataires commerciaux et de services de traiteur. Est-ce que ça cause des difficultés?
Oui. Certains de nos locataires n’offrent en ce moment aucune option équitable, alors nous allons les rencontrer au cours des prochains mois pour leur parler de Fairtrade, en espérant qu’ils acceptent d’ajouter quelques options. Nous discutons aussi actuellement avec certains de nos traiteurs, qui n’offrent pas toujours du sucre équitable lorsqu’ils s’occupent d’un événement.
Mais il est presque impossible de savoir tout ce qui se passe sur le campus, surtout dans les bureaux qui préparent souvent leur café avec leurs propres machines. Pour essayer de remédier à cette situation en particulier, nous avons lancé l’initiative de la pause-café Stingers Roast, où des ambassadrice·eurs Fairtrade visitent les bureaux de l’université avec du café et des collations équitables. Ces personnes ont pour mission de présenter brièvement Stingers Roast et Fairtrade. Nous espérons que cette sensibilisation aidera les gens à intégrer des choix durables à leur quotidien.
Selon vous, l’engagement de Concordia en matière de commerce équitable reflète-t-il les valeurs de l’université?
Tout à fait! Quand nous avons lancé Stingers Roast, nous l’avons fait en suivant les valeurs qui nous semblaient importantes pour le campus. L’université a un plan d’action 2020-2025 en matière de durabilité, dans lequel l’obtention de la désignation de campus équitable Argent est un objectif central.
Pour terminer, avez-vous des conseils pour les campus et les entreprises qui souhaitent obtenir la désignation équitable?
Le processus peut sembler intimidant, mais il faut savoir que Fairtrade Canada est d’une grande aide. Je collabore avec l’organisation depuis 2011, et honnêtement, je ne me rappelle pas une fois où j’ai dû attendre plus de quelques heures pour qu’on me réponde par téléphone ou par courriel. C’est une équipe dévouée et motivée, et je pense que la première chose à faire serait de les contacter pour exprimer votre intérêt.
La plupart des campus proposent sûrement déjà au moins une option de café équitable. Sinon, c’est le plus gros pas à franchir : commencer à servir des produits Fairtrade, en particulier du café, du thé et du chocolat. Ensuite, les autres étapes qui mènent à la désignation sont plutôt simples.
Tous les grands campus canadiens vont dans cette direction, et une fois les principes de Fairtrade adoptés, ils restent ancrés à long terme. Du point de vue de la stratégie d’affaires, ça semble un presque égoïste de publiciser notre désignation équitable, mais tout le monde y gagne vraiment.
L’engagement de l’Université Concordia en matière de pratiques éthiques, d’approvisionnement durable et de mobilisation communautaire montre les retombées positives que ces initiatives peuvent avoir, tant sur la culture d’un l’établissement que sur les valeurs de la société en général.
L’engagement équitable et les objectifs de développement durable de l’Université Concordia vous inspirent? Communiquez avec nous pour obtenir votre désignation de campus ou d’entreprise équitable.